le rétrofit électrique – ou la conversion de voitures thermiques en voitures électriques

L’urgence climatique impose une transition rapide vers des modes de transport plus respectueux de l’environnement. En France, où la voiture particulière représente encore 15 % des émissions de CO2, l’électrification du parc automobile s’impose comme une solution pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Toutefois, le renouvellement complet du parc de véhicules thermiques par des véhicules électriques pose de nombreux défis, tant en termes de temps que de coûts. Dans ce contexte, le rétrofit électrique – ou la conversion de voitures thermiques en voitures électriques – pourrait apparaître comme une alternative intéressante. Mais cette pratique peut-elle vraiment accélérer la décarbonation du secteur automobile, ou est-ce une solution aux promesses exagérées ? Explorons les opportunités et les limites de cette approche.

Le Contexte : Une Transition Lente et Complexe Vers l’Électrique

Le renouvellement complet du parc automobile français d’ici 2050 apparaît comme une tâche titanesque. Le système automobile, pilier de la mobilité en France, doit se transformer radicalement pour répondre aux objectifs de réduction des émissions de CO2. Mais la question clé est de savoir si cette transformation peut se faire à temps.

Une stratégie basée sur l’électrification massive

L’État français a misé sur l’électrification massive du parc automobile pour réduire les émissions. Selon le Secrétariat Général à la Planification Écologique (SGPE), cette transition devrait permettre de réduire de 11 millions de tonnes les émissions annuelles d’ici 2030. Toutefois, le rythme actuel de renouvellement des véhicules neufs n’est pas suffisant pour atteindre les objectifs de neutralité carbone en 2050. Si les ventes de véhicules thermiques seront interdites en 2035, il est estimé qu’environ 3 millions de véhicules thermiques pourraient encore être en circulation en 2050, compromettant ainsi l’atteinte des objectifs climatiques.

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Les défis d’un renouvellement rapide

Le renouvellement complet du parc pose des défis majeurs. La mise au rebut des véhicules thermiques, la production en masse de voitures électriques, et l’installation d’infrastructures de recharge partout sur le territoire nécessitent des investissements colossaux. De plus, les matériaux requis pour produire ces nouveaux véhicules sont en quantité limitée, et leur extraction pose des problèmes écologiques importants. Dans ce contexte, l’option du rétrofit électrique pourrait offrir une voie alternative pour accélérer la transition tout en réduisant les impacts environnementaux.

Le Rétrofit Électrique : Une Solution Prometteuse mais Limité par les Coûts

Le rétrofit électrique a été proposé comme une solution rapide pour réduire les émissions en agissant directement sur le parc automobile existant. Cette conversion de véhicules thermiques en véhicules électriques pourrait théoriquement combler le manque de véhicules électriques neufs. Pourtant, malgré un intérêt initial, le rétrofit peine à s’imposer.

Une opportunité théorique pour accélérer la transition

Selon Mobilians, le principal syndicat des professionnels de l’automobile, environ 193 000 véhicules pourraient être rétrofités d’ici 2028. Ce chiffre pourrait sembler encourageant, mais il ne représente qu’une petite fraction des 40 millions de véhicules en circulation en France. Le rétrofit pourrait donc jouer un rôle, mais il ne suffira pas à lui seul pour atteindre la neutralité carbone.

Des coûts prohibitifs pour les consommateurs

Le principal obstacle au développement du rétrofit est son coût. Convertir un véhicule thermique en électrique coûte entre 12 350 et 15 000 €. Même avec une subvention de l’État, le reste à charge pour le consommateur reste important. De plus, les batteries nécessaires à la conversion sont achetées à un coût bien plus élevé que celles des constructeurs automobiles, ce qui rend difficile la réalisation d’économies d’échelle. Le coût élevé des batteries et la complexité de la conversion rendent le rétrofit peu compétitif face à l’achat de véhicules électriques d’occasion.

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Une autonomie limitée pour une utilisation restreinte

Les voitures rétrofitées souffrent d’une autonomie limitée, souvent de l’ordre de 80 km. Cette contrainte réduit leur utilité à des trajets courts, rendant le rétrofit peu attrayant pour ceux qui ont besoin d’une voiture polyvalente. Avec l’émergence d’un marché de véhicules électriques d’occasion à des prix compétitifs, le rétrofit devient encore moins attractif pour les consommateurs.

Un Soutien Public Massif : Solution ou Piège ?

Face aux coûts élevés du rétrofit, certains plaident pour un soutien public encore plus conséquent. Mais cette approche serait-elle vraiment efficace ?

Une subvention plus généreuse, mais à quel prix ?

Pour rendre le rétrofit plus accessible, l’État pourrait envisager d’augmenter les subventions. Mais selon les simulations menées par les chercheurs de l’ESSCA, subventionner à hauteur de 8 500 € par véhicule conduirait à un coût de 400 € par tonne de CO2 économisée. Ce coût est bien supérieur à la valeur de référence fixée par la commission Quinet, qui est de 250 € par tonne en 2030. De plus, les véhicules rétrofités ont une durée de vie plus courte que les véhicules électriques neufs. Cela diminue l’efficacité globale de la politique.

Une stratégie limitée dans le temps

Même avec une baisse des coûts, le rétrofit pourrait ne pas être compétitif à long terme. À mesure que le marché des véhicules électriques d’occasion se développe, les consommateurs pourraient se détourner du rétrofit, préférant des véhicules offrant une meilleure autonomie et une fiabilité accrue. Ainsi, les investissements dans le rétrofit pourraient être rapidement dépassés par les évolutions du marché.

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Le Futur du Rétrofit : Opportunités dans des Niche ou Illusion Éphémère ?

Si le rétrofit des voitures particulières semble avoir des limites, cette technologie pourrait trouver des opportunités dans des segments spécifiques, comme les véhicules utilitaires légers (VUL) ou dans un système de mobilité profondément remanié.

Un avenir pour les véhicules utilitaires légers

Les véhicules utilitaires légers, grâce à leur espace de chargement, offrent des opportunités plus intéressantes pour le rétrofit. Ce segment pourrait permettre d’accueillir des batteries plus grandes et standardisées, ce qui résoudrait partiellement le problème de l’autonomie limitée. Des partenariats entre rétrofiteurs et constructeurs pourraient également permettre de réduire les coûts. Les chercheurs préconisent donc de concentrer le soutien public sur ces véhicules, où le rétrofit pourrait réellement faire une différence.

Un système de mobilité où la voiture devient une solution de dernier recours

Un autre scénario, défendu par le Forum Vies Mobiles, envisage une réduction significative de l’usage de la voiture individuelle. Une évolution au profit des transports en commun et des modes de transport actifs. Dans ce contexte, le rétrofit pourrait jouer un rôle important pour les rares véhicules encore nécessaires, comme les véhicules pour les professions isolées. Ce scénario permettrait de réduire les émissions tout en évitant les coûts élevés du rétrofit à grande échelle.

Le rétrofit, un espoir limité pour une mobilité décarbonée

Le rétrofit électrique représente une solution intéressante pour accélérer la décarbonation du parc automobile existant. Néanmoins ses coûts élevés et ses limites pratiques en font une option marginale. Le soutien public pourrait améliorer sa viabilité, mais au prix d’un coût par tonne de CO2 économisée bien supérieur aux autres options disponibles. En fin de compte, le rétrofit pourrait trouver sa place dans des niches spécifiques, comme les véhicules utilitaires légers ou dans un système de mobilité radicalement transformé. Pour le grand public, cependant, les véhicules électriques neufs ou d’occasion restent les options les plus prometteuses pour un avenir sans carbone.

By Cloridan Rochefort

Cloridan Rochefort, né en 1982 à Lyon, incarne l'utopiste convaincu des bienfaits des échanges sociaux en milieu urbain. Après des études en sciences sociales, il milite pour un espace communautaire à Lyon, promouvant le partage de compétences et de ressources. Initiatives telles que des jardins communautaires et des ateliers ont incarné sa vision utopique d'un mode de vie sain et autonome en milieu urbain. Sa biographie illustre son dévouement à construire des communautés urbaines épanouissantes basées sur l'échange et l'autonomie.

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