Chaque jour, nous consommons des aliments produits dans des champs où des pesticides sont souvent employés. Leur impact sur notre santé et l’environnement est au cœur des débats depuis des décennies. Dans ce contexte, deux cartes interactives majeures offrent des éclairages cruciaux : celle de Générations Futures, qui expose les achats de pesticides par département, et celle du projet Forever Pollution Project / Le Monde, qui révèle l’étendue de la contamination aux PFAS, les “polluants éternels”. Ces outils permettent à chacun de mesurer l’ampleur de ces pollutions et d’en comprendre les conséquences. Explorons ensemble ce qu’ils révèlent et pourquoi ils sont essentiels.
Deux cartes, deux réalités inquiétantes
La carte de Générations Futures sur les pesticides
Publiée en janvier, cette carte repose sur des données issues de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) et de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Elle permet de visualiser les achats de pesticides en fonction de leur toxicité pour les milieux aquatiques, leur composition en “polluants éternels” (PFAS) ou leur caractère perturbateur endocrinien.
Les départements de l’Eure-et-Loir, de la Marne et de la Somme figurent parmi les plus gros utilisateurs de substances dangereuses. Par exemple, près de 200 tonnes de glyphosate ont été achetées en Charente-Maritime en 2022, soulignant un recours massif à cet herbicide controversé. La carte permet de sélectionner différents paramètres : substance, risque ou statut légal, offrant ainsi une transparence sur la pollution chimique dans chaque territoire.
https://www.generations-futures.fr/geophyto

La carte des PFAS de Forever Pollution Project / Le Monde
Cette carte dévoile l’ampleur de la contamination aux PFAS en Europe. Ces “polluants éternels” se retrouvent dans l’eau, les sols et les organismes humains. Produits par l’industrie chimique, ils proviennent de sites industriels, terrains militaires et centrales d’incinération. Châteaudun (Eure-et-Loir) illustre l’étendue de cette pollution avec des relevés atteignant 10 000 ng/L, l’un des niveaux les plus élevés recensés.
Ces deux cartes se complètent : l’une met en lumière la responsabilité agricole et industrielle dans l’utilisation des pesticides ; l’autre expose les pollutions diffuses et persistantes des PFAS, soulignant leur omniprésence et leur dangerosité.
L’impact des pesticides sur l’environnement et la santé
Une menace pour les écosystèmes aquatiques
De nombreux pesticides sont toxiques pour les milieux aquatiques. Ils contaminent rivières, nappes phréatiques et sols, menaçant la biodiversité. Les départements méditerranéens, par exemple, sont parmi les plus grands consommateurs de soufre, un fongicide autorisé en agriculture biologique, mais dont l’usage excessif reste écologiquement préoccupant.
Perturbateurs endocriniens et santé humaine
Les perturbateurs endocriniens présents dans certains pesticides perturbent le système hormonal des humains, entraînant des conséquences graves : troubles de la fertilité, cancers, et effets cumulés sur plusieurs générations. Cette exposition prolongée, même à faible dose, pose des défis de santé publique majeurs.
Focus sur le glyphosate
Le glyphosate, bien qu’étroitement surveillé, reste très utilisé. Son lien avec certains cancers et ses effets négatifs sur les sols posent des questions majeures. La Charente-Maritime, en tant que grand utilisateur, illustre les tensions entre impératifs agricoles et enjeux de santé publique.
Les PFAS : ces “polluants éternels” qui nous entourent
Qu’est-ce que les PFAS ?
Les PFAS (substances perfluoroalkylées) regroupent des milliers de molécules issues de l’industrie humaine. Ces polluants se retrouvent dans nos ustensiles de cuisine, vêtements, emballages alimentaires, et bien plus. Leur surnom de “polluants éternels” vient de leur extrême persistance dans l’environnement.
Des conséquences sanitaires alarmantes
Les PFAS augmentent les risques de cancer, perturbent la thyroïde et sont liés à des problèmes de fertilité. Une étude menée entre 2014 et 2016 par Santé publique France a montré que 100 % des 744 personnes testées avaient des traces de PFOS et de PFOA dans leur organisme. Ces substances, bien qu’interdites depuis des années, persistent dans notre chaîne alimentaire.
Une pollution sans frontières
Des sites industriels comme ceux de la vallée de la chimie près de Lyon rejettent des quantités massives de PFAS. Mais ces polluants se propagent bien au-delà des périmètres industriels, contaminant cours d’eau et sols. Les relevés de Châteaudun et les travaux du consortium Forever Pollution Project révèlent une situation alarmante qui nécessite une action urgente.
Quelle réglementation pour demain ?
Une prise de conscience tardive mais cruciale
En avril 2024, l’Assemblée nationale a voté une loi visant à interdire les usages non essentiels des PFAS d’ici 2026. Cependant, des exceptions subsistent, notamment pour les ustensiles de cuisine en Teflon. Ce compromis reflète le poids des industriels, qui invoquent le chantage à l’emploi pour freiner les restrictions.
Pollueur-payeur : un principe à renforcer
La loi introduit un principe de pollueur-payeur avec des taxes pour les entreprises responsables de rejets de PFAS. Mais son application reste un défi face aux lobbys industriels. La mise en place de contrôles obligatoires sur tout le territoire pourrait cependant être un levier clé pour réduire la contamination.
Vers une agriculture durable
L’abandon progressif des pesticides les plus toxiques et des PFAS est possible. Des alternatives écologiques comme les biopesticides ou les méthodes de lutte biologique offrent des solutions prometteuses. Cependant, ces transitions exigent un soutien massif aux agriculteurs, souvent coincés entre contraintes économiques et environnementales.
Des outils puissants pour sensibiliser
Les cartes interactives de Générations Futures et du projet Forever Pollution Project / Le Monde sont des outils puissants pour sensibiliser à l’impact des pesticides et des PFAS. Elles mettent en lumière une réalité alarmante mais également une opportunité : celle de transformer nos systèmes agricoles et industriels pour protéger notre santé et l’environnement. Les citoyens, élus et industriels doivent agir ensemble pour que ces substances ne définissent pas l’héritage que nous laisserons à la prochaine génération. La réglementation seule ne suffira pas ; une mobilisation collective est essentielle pour tourner la page des “polluants éternels”.